Origines,Signification et Production du Faso Danfani
Origines et Signification du Faso Danfani
Le terme “Faso Danfani” signifie littéralement “pagne tissé de la patrie”. Historiquement, le tissage était une activité masculine chez les la plus part des ethnies du Burkina. Parmi les différentes ethnies présentes au Burkina Faso, on trouve les Mossis, qui constituent l’ethnie principale, ainsi que les Markas, les Gourmantchés, les Dagara, et les Bobos, entre autres. Chaque ethnie possède ses propres motifs, riches de significations et de symboles. Ces motifs sont non seulement esthétiques, mais ils véhiculent également des histoires et des valeurs culturelles propres à chaque communauté. Les hommes tissaient sur des métiers horizontaux, tandis que les femmes étaient responsables de la filature et de la teinture du coton. Cette division du travail reflétait une organisation sociale précise, où chaque genre avait des rôles spécifiques dans la chaîne de production textile.
Dans les années 1980, le président Thomas Sankara a élevé Faso Dan Fani au rang de symbole de fierté nationale et d’indépendance économique. Il a encouragé les citoyens à porter des vêtements produits localement. Ce mouvement a non seulement stimulé la production textile locale, mais a également renforcé une identité nationale collective enracinée dans l’autonomie et l’authenticité culturelle.
Le Processus de Production
La fabrication du Faso Danfani se déroule en plusieurs étapes clés :
- Culture et récolte du coton : Le Burkina Faso est l’un des principaux producteurs de coton en Afrique de l’Ouest. Le coton, cultivé localement, est récolté puis transformé en fil. L’Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina (UNPCB) joue un rôle central en fournissant du fil biologique de haute qualité, certifié GOTS, aux artisans. Cette certification garantit une production respectueuse de l’environnement et des normes sociales élevées.
- Egrenage du coton : il se fait à SECOBIO-SA, la première usine du genre en Afrique de l’Ouest. Située dans la région Centre-Ouest, elle est détenue majoritairement par les producteurs de coton (UNPCB). Cette usine permet de valoriser la filière biologique, d’accroître la compétitivité du coton burkinabè et de favoriser l’emploi local, notamment celui des femmes.
- Filature : Le coton brut est acheminé vers l’unique usine de filature en Afrique de l’Ouest, la Filature du Sahel (FILSAH) où il est transformé en fil prêt pour le tissage. Cette étape industrielle assure une production de fil conforme aux standards requis pour le tissage artisanal.
- Teinture : Avant le tissage, les fils sont teints. Deux types de colorants sont utilisés : les colorants certifiés GOTS (Global Organic Textile Standard) et les colorants naturels. Les colorants GOTS garantissent une teinture écologique et respectueuse de l’environnement, tandis que les colorants naturels, extraits de plantes locales et de l’argile perpétuent des techniques ancestrales de teinture.
- Tissage : Les fils teints sont ensuite tissés à la main sur des métiers traditionnels en grande et petite largeur. Les artisans, principalement des femmes, créent des motifs variés en combinant différentes couleurs et techniques de tissage. Chaque motif possède une signification particulière et reflète une histoire ou une symbolique propre à la culture burkinabè.
Diversité des Produits
Outre le Faso Danfani aussi appelé pagne tissé labellisé, les artisans burkinabè produisent d’autres textiles traditionnels :
- Bogolan : Originaire du Mali, le bogolan est également fabriqué au Burkina Faso. Ce tissu est teint à l’aide de boue fermentée (argile), créant des motifs uniques aux teintes terreuses. En complément de l’argile, le Ngalama, ainsi que les feuilles d’autres plantes, jouent un rôle dans la production du bogolan.



- Indigo : Utilisant des teintures naturelles à base de plantes, notamment l’indigotier, les artisans produisent des tissus aux nuances bleutées profondes.



- Batik : Cette technique consiste à appliquer de la cire sur le tissu pour créer des motifs avant de le teindre. Après teinture, la cire est retirée, révélant des dessins contrastés.



Rôle Socio-Économique et Culturel
La production du Faso Danfani et d’autres textiles traditionnels joue un rôle crucial dans l’économie locale et le développement humain. Elle offre des opportunités d’emploi, en particulier pour les femmes, contribuant ainsi à leur autonomisation et à la réduction de la pauvreté. De plus, ces activités préservent et valorisent le patrimoine culturel burkinabè, renforçant le sentiment d’identité nationale et le capital social des communautés.
Des initiatives, telles que la labellisation du Faso Danfani, visent à protéger ce patrimoine contre la contrefaçon et à promouvoir sa reconnaissance sur les marchés internationaux. Cette démarche assure une meilleure valorisation du travail des artisans et garantit aux consommateurs l’authenticité et la qualité des produits. Elle contribue également à une distribution plus équitable des revenus au sein de la filière.
Défis et Perspectives
Malgré son importance culturelle et économique, la filière du pagne tissé au Burkina Faso fait face à plusieurs défis :
- Concurrence des produits importés : Les textiles importés, souvent moins chers, représentent une concurrence pour les produits locaux.
- Accès aux marchés internationaux : Bien que le Faso Danfani soit apprécié au-delà des frontières, son exportation reste limitée en raison de contraintes logistiques et de la méconnaissance des marchés étrangers.
- Modernisation des outils de production : Tout en préservant le caractère artisanal, l’introduction de technologies appropriées pourrait améliorer la productivité et la qualité des produits, tout en veillant à limiter l’impact environnemental.
Pour surmonter ces obstacles, des efforts concertés entre le gouvernement, les organisations professionnelles, les partenaires internationaux et les acteurs de la société civile sont nécessaires. La promotion du “consommer local”, la sensibilisation à l’importance du patrimoine textile burkinabè et le renforcement des capacités des artisans peuvent stimuler la demande intérieure et soutenir les acteurs locaux.
En conclusion, le Faso Danfani est bien plus qu’un simple textile. Il est le reflet d’une histoire riche, d’un savoir-faire ancestral et d’une identité culturelle forte. Soutenir sa production et sa promotion revient à préserver une partie essentielle du patrimoine burkinabè, à encourager le développement économique et social du pays, et à investir dans le capital humain des communautés locales.
Karfa YACORO
Directeur de CABES
Economiste gestionnaire